Le Penseur et l'Expert, 2003Versions: accessible () Available ()
Sams Dine Sy e.a. Editeur, 2003
sans recherche et sans fard, atteint de sa voix
des milliers d’années à cause du dieu »
Héraclite
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Samir Amin a enseigné la prospective, bien avant qu'elle devienne cette discipline avec ses théories, ses méthodes, ses réalisations son référentiel et ses cursus de formation et ses chapelles, aussi promptes à exclure qu'à s'approprier les idées neuves. A force de fustiger, le "TINA’' (There Is No Alternative) et de proposer une alternative à la globalisation néo-libérale, il a déclenché chez plusieurs d'entre nous, le goût de la recherche prospective et de l'analyse de politique
Nos chemins se sont croisés parce qu'il m'avait été demandé, en 1991 de procéder à l'évaluation rétrospective de l'IDEP, à travers les divers programmes de formation et de recherche mis en œuvre de 1960 à 1990. J'ai découvert le travail qu'il avait accompli à travers les minutes, parfois bien protégées derrière une armée de cafards et d'araignées, les rapports, souvent illisibles tant la qualité du Stencil laissait à désirer, les "audit notes" entreposés dans le sous-sol d'un Institut qui n'était plus que l’ombre de lui-même. Une fois que mon jugement était bien formé à travers les dossiers, j'étais prêt à l'auditionner. L'exercice s'avérait périlleux car il émanait de sa part un sentiment de méfiance légitime. L'histoire de l'IDEP est jalonnée de missions d'expert - rapport Jackson, rapport Kaya, rapport Aké - toujours instrumentées dans un sens ou dans l'autre. Les derniers en date avaient tenté de disqualifier sa conception du développement. Mais j'avais aussi l'impression qu'il attendait cette occasion depuis son départ de l'IDEP en 1978, pour tirer un trait sur cette expérience qui fut aussi exaltante que douloureuse. J’avais réussi néanmoins au fil des discussions à recueillir sa part de vérité.
Quand, par la suite, j'ai été sollicité pour participer au sauvetage de l'IDEP, entre 1992 et 1993 dans des conditions qui, il faut bien souligner, relevaient d'une mission impossible, j'avais acquis l'intime conviction qu'il fallait reprendre le flambeau là où il l'avait planté et capitaliser sur les innovations qu'il avait introduites. Mon expérience en matière d'évaluation de programme et ma curiosité personnelle, m'avaient conduit assez facilement, sur les chemins l'analyse de politique, une discipline dans tous les sens du terme, qui est appelé à connaître une expansion fulgurante et qui, dans la phase actuelle de reconception de l'Etat africain était en mesure d'en fournir le cadre analytique et les principes normatifs.
J’ai fini par découvrir à quel point il était difficile de réformer un système de planification qui avait été imposé pour servir des besoins à la fois contradictoires et contestables, puisqu'il avait pour ambition de créer en Afrique, un corps de professionnels du développement économique par :
- la transmission des connaissances techniques formalisées, dans ce domaine, dans les pays industrialisés ;
- l’application de ces connaissances pour faciliter l'acheminement de l'aide extérieure pour le développement ;
- la régionalisation de la formation en vue de réaliser des économies d'échelle et un impact plus important ;
- le respect des normes de planification adoptées par les Nations Unies et la contribution à leur diffusion ;
- l’obligation pour les participants de retourner dans leurs services d'affectation pour mieux contribuer à l'exécution des plans.
Cette approche ne tenait pas compte de l'évolution de l'environnement mondial. Aussi, les crises nées du premier et second choc pétrolier et de la bataille pour le Nouvel Ordre Economique International (NOEI ont eu pour effet d'accentuer la vulnérabilité des économies africaines. Au plan strictement méthodologique, force est de constater que les progrès réalisés en matière d'analyse stratégique et prospective ont rendu obsolète le système de planification préconisé pour l'Afrique. Les gurus qui font encore fortune avec les outils nés de ces progrès, ignorent encore ce qu'ils doivent à l'effort que S. Amin a abattu pour conceptualiser la théorie du développement du sous-développement et formuler la stratégie d'auto-dépendance collective, au cours des années 70. Avec le recul, on sait que ce n'est pas parce qu'une innovation est bonne qu'elle est adoptée mais c'est parce qu'elle est adoptée qu'elle devient bonne. La démarche de S. Amin ne pouvait qu'être combattu avec une extrême vigueur, par ceux-là qui devaient se l'approprier par la suite.
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Introduction
1. Au cœur de sa réflexion : l'ouverture et l'approfondissement de la science économique
2. Une école de pensée qui sert de pivot à la réflexion sur la mondialisation
3. Donner la parole aux chercheurs, envers et contre tout
4. De la planification à l’invention du futur
1. Violence contre l’Afrique
2. L’Afrique en quête de vision prospective
3. Le NEPAD
4. L'impact de la tragédie du 11 /09/2001 sur la Vision courante de l'Afrique
Les scénarios américains après le 11 septembre
Les impacts en Afrique
Quelques références bibliographiques