ANALYSE DE POLITIQUE
Déploiement en AfriqueAvenir du Socialisme
Avenir du Socialisme
Les Sénégalais sont frappés par les événements qui, depuis une décennie rythment la vie du pays et spécialement par la multiplication des situations d'urgence à la suite de conflit, de crise ou des catastrophes. C'est d'abord une série d'avertissement sans frais ou à frais limité, même s'ils ont engendré des traumatismes : crise sénégalo-mauritanienne, rupture des relations avec les bailleurs de fonds, dévaluation du FCFA, black-out de la Senelec, explosion à la Sonacos, crise sénégalo-guinéenne (Bissau), violences politiques et autres émeutes urbaines plus ou moins téléguidées.
Avec le début des années 2000*, on assiste une nouvelle série d'événements : crise avec les pays voisins et avec la Côte d'Ivoire, violences en Casamance, affaire des audit, intempéries climatiques, déficit pluviométrique, dysfonctionnements de la Senelec et de la filière arachidière qui témoignent du contexte régional et national de mal gouvernance (pauvreté, précarité, conflits, corruption, coups d'Etat, faible participation des citoyens). Pour couronner le tout, la tragédie du Joola qui met à nu un ensemble de défaillances dans tout le système tactique, stratégique et politique sénégalais. Le naufrage du Joola révèle toute l'ampleur de la crise de l'Etat et son impuissance à assister des personnes en danger. L'incapacité des pouvoirs publics à ouvrir une information judiciaire, alors que près de 2000 personnes sont mortes laisse un sentiment de perte de légitimité. Alors que les intérêts vitaux de la nation sont en jeu, on découvre l'inutilité des dirigeants politiques. Le monde entier a pu observer à quel point l'architecture institutionnelle était vulnérable.
A la suite de Montesquieu, on peut dire que "si le naufrage du Joola a pu provoquer un retentissement immense dans la société, c'est que des conditions générales existaient qui lui ont donné sa force de déstabilisation". Parmi ces conditions figurent sans aucun doute le dépérissement de l'Etat socialiste. Le fait que le parti socialiste ait perdu les élections présidentielles après quarante de règne, a sans doute quelque chose à voir avec la perte par l'Etat du Sénégal d'un navire aussi chargé de symboles que de passagers. Tel devrait être le principal angle d'attaque de prospective du socialisme au Sénégal dans un monde incertain depuis qu'il est entré dans l'âge du terrorisme et de guerre préventive. Cette question devra, cependant être abordée dans une perspective multidimensionnelle, compte tenu de l'existence de liens étroits entre les facteurs qui sont à l'origine de la crise qui affecte le socialisme, l'économie nationale et l'Etat du Sénégal.
Il convient d'abord de noter que cette chronique d'événement a commencé au milieu des années 80 alors que le socialisme d'Etat était à son apogée au Sénégal. Elle s'est amplifiée, une fois que le pouvoir en place depuis 1980 a été défait par les urnes, sans pour autant que se mettent en place les instruments efficaces de régulation des marchés et de gestion des risques sociaux.
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*Cet exercice a une base pratique, puisqu’il a été élaboré dans le cadre d’une contribution de l’auteur à un groupe d’experts indépendants mis sur pied au début de l’année 2003 par un des partis politiques sénégalais, soucieux de ne pas se limiter à une réflexion politique purement tactique.